mercredi 7 décembre 2011

Héroïne en CDI épisode 13 : LA RÉUNION

Cet après-midi-là, il y avait une réunion à laquelle je devais assister. Enfin, disons plutôt que le matin même on m'avait lancé le carton d'archives dans les pattes. Contrairement à ce qui arrive si vous me faites la même chose avec une balle, je rattrape, car on me paye pour ça. Ah, le pouvoir de l'argent.

« -Chef, oui, chef, pas de problème, je vais assurer grave.


T'as intérêt, la minette. »

(pas vraiment en ces termes précis)

Pour une personne normalement motorisée, ce genre de choses ne devrait pas poser trop de problèmes. Or il se trouve que ce matin-là justement, je ne le suis pas du tout. Évidemment, c'est bien après l'échange ci-dessus que je m'en rends compte. Me voilà donc à midi, rentrer à biclou à travers champs – c'est joli mais là j'ai faim, si tu veux. Puis entrer en coup de vent chez moi pour me saisir d'un quignon quelconque et de ma belle clé de voiture – une vraie clé sans pile, là. Oui, car j'ai une voiture, c'est bon. Certes, les pneus sont pas beaucoup plus larges que ceux d'un solex. Certes, je l'ai repeinte moi- même, au rouleau, et pas en noir je peux vous dire. Mais elle est en bon état, et elle consomme presque rien. Vroum vroum, il y a du brouillard, mes phares jaune soleil me guident jusqu'au petit parking devant les bureaux de l'hôpital psy – on rénove un bâtiment là-bas. Je me love contre un magnifique 4x4 rutilant et qui fait un bon paravent.

La réunion se déroule tranquillement, j'ai finalement la surprise de voir mon boss se pointer quand même; ah ben ça valait bien la peine de me casser la nénette... Il y a quatre ou cinq intervenants, le béton, les fluides (nous), l'économiste, l'architecte, l'hôpital. Une fois terminé, je m'éclipse en premier et me remets au volant, soulagée. Comment on pourrait décrire le bruit de la batterie morte parce que j'ai oublié les phares? Quelque chose comme, rheu rheu rheu ou bien couii, couii. Bon, ça fait ça.

Ah, je suis bien contente. Voilà une bonne occasion de prouver ma débrouillardise et ma capacité à me sortir de toute situation.

C'est à ce moment-là que sort le responsable du gros-oeuvre. (le béton. faut pas rigoler avec ça.) Il vient droit sur moi. Euh pardon, sur le 4x4 à ma gauche. Ah, c'est lui! Je lui saute dessus avec mes pinces, en lui résumant la situation.

C'est quand je lui demande si il pourrait m'ouvrir son capot que ça devient fendard. Il savait pas comment faire...

On a cherché partout, sous le volant et dans le tableau de bord. Ca sentait fort le neuf là-dedans. D'un coup, tching, le bon bouton est trouvé. Je me branche illico, rouge sur rouge, noir sur noir.

Là, je vois du coin de l'oeil mon patron sortir à son tour en compagnie de l'architecte, et c'est à peine s'il ne se passe pas la main sur le visage comme le Bouillon dans le Petit Nicolas.

Ah ben ça, les batteries de tracteur, ça dépote, je m'envole presque quand je tourne la clé. Sur ce, je remercie mon bienfaiteur, évite soigneusement de caler en tirant le starter bien fort, et repars pour de nouvelles aventures.

Héroïne en CDI