Quand l’avenir appartient aux patrons dont les ouvriers se lèvent tôt.
Quand l’usine où tu viens d’être embauché fait des contrats
hebdomadaires, soit alors jusqu’à 18 mois 72 contrats d’une page format
21 x 29,7 cm comprenant durée du contrat, personne que tu remplaces et
convention collective auquel tu es rattaché. Mais bon, tu ne vas pas y
passer ta vie.
Quand un collègue, te voyant passer avec un transpalette te clame « Alors, t’es dans les transports ? »
Quand il faut tenir le rythme.
Quand tu apprends incidemment que le groupe auquel appartient l’usine
où tu travailles s’est fondu ou a été racheté tu ne sais pas bien par
un autre groupe dont t’as pas trop retenu le nom.
Quand l’entreprise ne renouvelle pas le contrat des CDD qui ont les 1200 heures leur donnant droit aux ASSEDIC
Quand tu apprends bien vite que prolongé au-delà de 18 mois un CDD devient automatiquement un CDI.
Quand ce collègue, te voyant passer avec un transpalette te clame « Alors, t’es dans les transports ? »
Quand tu dis que tu es ouvrier et que quelqu’un te réponds « mais vous cherchez du travail, sinon ? »
Quand tu regardes à la pause quel temps il fait, dehors.
Quand le Comité d’Entreprise fait payer les bouteilles d’eau.
Quand t’arrives sur un poste que tu ne connais pas et que tu t’y prends comme pour tuer ton père.
Quand quelqu’un te demande « mais dans votre boite, il n’y a pas
beaucoup de noirs et d’arabes ? » et que tout ce que trouves à dire
c’est « Je n’ai pas regardé ».
Quand le collègue te voyant passer sur un transpalette te clame « Alors, t’es dans les transports ? »
Quand une note de service informe que dans cet atelier les
intérimaires et CDD qui n’auront pas la productivité requise ne verront
pas leur contrat renouvelé et les titulaires se verront déplacés dans un
autre atelier.
Quand le dernier jour de l’année le chef d’atelier te fait dire que
en fait, non ton contrat ne sera pas renouvelé et que donc il ne faudra
pas oublier de rendre tes bottes et l’étiquette de ton casier en
partant, merci.
Quand le réveil t’es une déclaration de guerre quotidienne.
Quand tu prends ta première tasse de café de la journée.
Quand il fait nuit au moment où tu arrives le matin.
Quand la chef d’atelier dit à ton chef « je t’emprunte celui-là » en te désignant du doigt.
Quand un collègue te parle de quelqu’un en disant « Le noir » et que tu réponds « ah, jean jacques … »
Quand tu es convoqué au bureau pour signer ta titularisation et que
tu glisses à un collègue en passant « si je ne suis pas revenu d’ici un
quart d’heure, appelle mes parents »
Quand ça te tire.
Quand ton collègue te dis « Mais moi, je croyais que tu étais
titularisé depuis longtemps, vu depuis combien de temps tu bosse
ici ….. »
Quand un collègue te dis « mais tu ne vas quand même pas rester là toute ta vie ? »
Quand t’entends des collègues parler de la porte du frigo qui sort de ses gonds et on est tous menacé de se la prendre, un jour.
Quand une note de service informe que l’entreprise investit
aujourd’hui dans la qualité humaine en recrutant trois cadres qui se
sont déclarés très flattés d’intégrer une telle société et du coup, ben
t’es bien content aussi.
Quand tu comptes les heures.
Quand tu comptes, tes heures.
Quand tu comptes, tes sous.
Quand il fait nuit quand tu pars le soir.
Quand pour les cinquante ans de ta boite la chargée de communication
détaille dans la presse les offres promotionnelles spéciales faites aux
consommateurs et n’y prononce pas une fois le mot salarié et encore
moins ouvrier.
Quand pour les cinquante ans de ton usine, ta boite t’offre un calendrier.
Quand dans un entretien à un journal le patron dit qu’il est lui
difficile de trouver des gens pour travailler de nos jours, il y a trop
d’assistanat, vous savez.
Quand tu tentes de négocier, avec ton dos.
Quand quelqu’un te demande comment si ça va, le boulot et que tu réponds que ça paye, le loyer.
Quand ton salaire net est encore indexé sur le SMIC, après toutes ces années
Quand t’attends La Gauche
Quand tu prends pour une augmentation de salaire d’avoir négocié un plus grand découvert avec ton banquier.
Quand tu expliques à ton médecin de famille que non tu n’as pas les moyens de te savoir malade, là maintenant.
Quand le collègue te voyant passer avec ton transpalette te clame « Alors, t’es dans les transports ? »
Quand un collègue demande à Mehdi d’où il vient et qu’il répond « de l’atelier conditionnement ».
Quand une note de service assure que non le groupe auquel appartient
la société dont dépend ton usine n’a pas aujourd’hui l’intention de la
vendre donc tu es bien rassuré et tout.
Quand en salle de pause vous faites tous la queue devant la machine à café.
Quand tu pars en vacances.
Quand tu sais précisément en te levant le matin chez toi ce que tes collègues font à cette heure-là.
Quand tu te couches tard.
Quand en salle de pause une collègue demande un Doliprane et que trois mains secourables se tendent.
Quand tu reçois ton chèque cadeau et que du coup tu envisages
l’achat d’un corset et tu demandes si la pharmacie prends les chèques
cadhoc, ah non pourquoi ?
Quand tes collègues épluchent en salle de pause les offres promos sur les catalogues des supermarchés.
Quand tu vois sur le planning que la semaine prochaine tu vas travailler avec un homme.
Quand tu es ravi comme au lycée de pouvoir terminer avec 15 minutes d’avance.
Quand le collègue, te voyant passer avec ton nouveau transpalette te clame « Alors, t’es dans les transports ? »
Quand un nouveau chef arrive à l’atelier et qu’il te demande à toi,
la main sur son transpalette, prêt à l’emploi « il reste quoi à
faire ? » et que tout ce que tu trouves à répondre « Ben, voter à
Gauche ».
Quand tu parles à un collègue de ton mal au dos et que vous vous dites que « le travail se paye »
Quand une étudiante en contrat saisonnier te glisse qu’elle a oublié
de passer signer son contrat la veille, que tu lui rétorque, en boutade,
que ce n’est pas grave, au bout de trois jours elle deviendra
titulaire, embauchée définitivement, et que tu réalises, à sa
tête, que tu lui as fait la peur de sa vie.
Quand on te demande de remplacer une fille.
Quand tu réalises depuis combien de temps tu travailles dans cette boite.
Quand tu dis que tu es ouvrier et que ta mère te demande « mais tu cherches un métier, sinon ? »
Quand tu réalises combien de temps il te reste à faire dans cette boite avant ta retraite.
Quand tu surveilles tous les matins sur Internet combien il te manque
sur ton compte, comme d’autres le cours de la bourse, sauf que bon
c’est différent là ce sont tes sous.
Quand tu ne réalises pas combien tu toucheras à ta retraite.
Quand tu es placé en RTT deux jours et te demande ce que tu vas faire, tout ce temps libre soudain.
Quand un collègue te dis « On n’est pas payé, mais qu’est ce qu’on rigole »
Quand tu demandes le black qui te faisait sa blague et t’apprends que Jean-Baptiste a été renversé, par un transpalette.
Quand tu mets Ouvrier sur ta bio Twitter parce que bon entre autres choses, voilà.
Quand t’attends de la Gauche ….
…Alors, tu milites …